Alexandre a-t-il laissé son empreinte dans des villes du Levant Antique ? Je vous propose de faire un petit point en balayant les fondations d’Alexandre et du diadoque Antigone en Syrie antique. Elles sont parfois contestées ou juste supposées. Il s’agit quelquefois de refondations de villes plus anciennes.
Les fondations supposées d’Alexandre et d’Antigone en Syrie
Pour Alexandre :
- Alexandrie près d’Issos, aujourd’hui Iskanderun
- Marathos
- Dion et Pella en Décapole
- Pella de l’Oronte (future Apamée)
- Gérasa
- Samarie
- Gaza
Pour Antigone :
- Antigoneia
- Pella de l’Oronte (future Apamée)
- Cyrrhos
- Gindaros
Les fondations d’Alexandre au Levant antique
Alexandrie près d’Issos
Une fondation supposée
William Tarn (1869-1957) a supposé qu’Alexandrie sur Issos (Alexandrie Scabiosa) était une fondation d’Alexandre le Grand, à cause de son nom. (William Tarn, Alexander the Great, 1948)
Alexandre l’aurait fondée près du port de Myriandros.
Toutefois, cette fondation fait débat. Aucun des historiens classiques d’Alexandre (Diodore, Quinte-Curce, Arrien) n’en parle. Pourtant, la ville est plutôt célèbre et ces trois auteurs aiment évoquer les fondations de leur héros !
Une cité rebaptisée en l’honneur d’Alexandre ?
Peut-être Alexandre l’a-t-il fondée en lui donnant un autre nom ? Puis la cité aurait obtenu le droit de prendre le nom de son fondateur et serait devenue Alexandrie. Elle se trouve à 20 kilomètres du site de la bataille d’Issos, qui a ouvert la voie de la Syrie à Alexandre. C’est assez près pour que les habitants aient ressenti l’envie et la légitimité à s’approprier le souvenir de cette victoire.
Alexandre a érigé 3 autels en témoignage de sa victoire dans la plaine d’Issos. Cicéron les a vus (Ad Familiares, 15, 4).
Hérodien (III, 4, 3) va dans le sens d’un rapport entre les deux évènements : il établit un rapport entre la victoire d’Issos et la fondation d’Alexandrie. Mais il ne dit pas qu’Alexandre est le fondateur.
Pour l’instant, aucune fouille n’a été faite dans la ville d’Iskanderun / Alexandrette (le nom de la ville aujourd’hui). On ne peut donc que conjecturer.
Ce qui est sûr, c’est que cette ville existe au plus tard sous le règne d’Antiochos IV (215-164). À cette époque, elle bat monnaie.
Les colonies militaires
Les fondations d’Alexandre et d’Antigone en Syrie, ce sont parfois non pas des cités, mais des colonies militaires.
Il n’y a aucune cité dont on soit sûre qu’elle ait été fondée par Alexandre. Mais des colonies militaires ont été installées par le grand roi ou par ses généraux de son vivant.
C’est peut-être le cas de Marathos, face à Aarados.
C’est aussi Dion et Pella en Décapole, Pella de l’Oronte (future Apamée), Gérasa et surtout Samarie, qui a été installée après la révolte de 331.
C’est peut-être aussi Gaza. Les récits de l’expédition d’Alexandre disent qu’il l’a détruite, puis refondée en y installant des Macédoniens et des habitants des environs. Ni les uns, ni les autres n’étaient des partisans de la vie civique. On serait donc plutôt dans le cadre d’une colonie militaire que d’une cité.
Il faut noter que toutes ces colonies sont situées à des points stratégiques : la trouée de Homs, la Décapole, la vallée de l’Oronte, la Samarie, la porte de l’Égypte. Leur intérêt militaire est donc indéniable.
Les fondations d’Antigone en Syrie antique
Antigoneia
Antigoneia est la rivale malheureuse d’Antioche. Elle personnifie la rivalité qui a opposé Antigone à Séleucos Ier, un autre diadoque d’Alexandre.
Avant que Séleucos Ier s’empare de la Syrie du Nord en 301, Antigone a fondé Antigoneia dans la plaine du bas Oronte.
Dix ans plus tard, Séleucos fonde Antioche. Antigoneia est dépeuplée à son profit.
Toutefois, elle est encore mentionnée sous Démétrios II. À cette époque, c’est sûrement un village du territoire d’Antioche.
On en parle encore lors du combat de Cassius contre les Parthes en 51.
Pella sur l’Oronte
Pella sur l’Oronte est peut-être une colonie militaire d’Alexandre. Mais l’historienne Janine Balty a suggéré qu’elle pouvait être une fondation d’Antigone.
Pella a succédé au village perse de Pharnakè. Elle protège dès 307 la frontière sud contre une attaque des Lagides situés en Égypte. Plus tard, c’est là que s’élèvera la célèbre Apamée sur l’Oronte.
Cyrrhos et Gindaros
Cyrrhos et Gindaros sont deux cités voisines qu’on attribue aussi à Antigone. Ce serait des transpositions en Syrie de bourgades voisines de Macédoine.
Il y a certainement eu des fondations d’Alexandre et/ou d’Antigone en Syrie. Mais, comme on le voit, tout reste assez hypothétique. Les Séleucides qui s’installent ensuite durablement dans la région vont en effet atténuer les souvenirs de ce qui a été fait juste avant eux.
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Sources :
SARTRE, Maurice, D’Alexandre à Zénobie. Histoire du Levant antique. IVe siècle av. J.-C. – IIIe siècle ap. J.-C., Fayard, 2001
Image d’en-tête :
Mosaïque d’Alexandre montrant la bataille d’Issos – Mosaïque de la Maison du Faune à Pompéi – Musée archéologique de Naples
À PROPOS DE L'AUTEURE
Je suis Marie, passionnée d'antiquité et de mythologie grecque depuis l'enfance. J'ai acquis un gros bagage dans ce domaine grâce à mes lectures, innombrables, sur le sujet : ma bibliothèque compte plusieurs centaines d'ouvrages, sources antiques et essais historiques traitant de nombreux aspects de ces périodes anciennes.
Je suis également diplômée d'histoire ancienne et médiévale (Maîtrise, Paris IV Sorbonne). J'ai notamment travaillé sur l'antiquité tardive, le Bas Empire romain et la romanisation des peuples germaniques.
Je suis l'auteure de plusieurs romans et nouvelles, dont Atalante, qui réinterprètent et revisitent la mythologie grecque et l'antiquité.