Louve Capitoline - Sculpture en bronze montrant l'allaitement des jumeaux Romulus et Rémus par la louve - Musée du Capitole

Rome : quand tout a commencé…

Les origines de Rome appartiennent certes à la légende, mais des traces archéologiques montrent que le mythe s’est nourri du concret de l’Histoire. D’Énée à Romulus en passant par Hercule, traçons à grands traits les épisodes fondateurs de la Ville qui sera un jour dite Éternelle !

Les glorieux prémices de Rome : Hercule et Énée

Une grande civilisation veut une légende qui explique son succès. Il était nécessaire que Rome ait connu des débuts hors du commun et, même en deçà des origines officielles, des espèces de prémices qui annonçaient un avenir glorieux.

Hercule, le héros de passage sur l’Aventin

Hercule (l’Héraklès grec) est un héros très aimé des Romains. Quoi de plus plaisant pour eux que de l’imaginer errant pendant ses travaux jusqu’au site de ce qui sera un jour la future Rome ?


Le contexte, c’est le 10e travail, celui qui consiste à voler les bœufs de Géryon. Hercule traverse l’Italie avec le troupeau. Il arrive aux abords de l’Aventin. Là vit Cacus, un géant cracheur de feu, fils de Vulcain.


Cacus vole quelques bêtes à Hercule. Très mécontent, le héros poursuit le géant jusque dans sa grotte de l’Aventin et le tue.


À l’époque romaine, cette histoire donnait une origine mythique au temple d’Hercule qui se trouvait sur le Forum Boarium (marché aux bestiaux de Rome). Il existe encore un temple d’Hercule Victor sur les bords du Tibre.

Temple d'Hercule Victor à Rome, sur l'ancien emplacement du Forum Boarium - Photo de Michael Wilson
Temple d'Hercule Victor à Rome, sur l'ancien emplacement du Forum Boarium - Photo de Michael Wilson

Énée, l’ancêtre de Romulus

Virgile nous conte cette histoire dans L’Énéide.


Quand Troie tombe sous les coups des Grecs, un Troyen s’échappe en portant son père sur son dos. Le père, c’est Anchise, le gentil berger qui a jadis séduit la déesse Aphrodite par sa beauté. Le fils qui le porte, c’est Énée. Le fruit de son union avec la déesse.


Énée traverse les mers jusqu’à s’installer en Italie, chez les Latins. Là, après moult péripéties, il fonde la cité de Lavinium. Il fait également souche : dans sa descendance, on compte un certain Romulus… mais aussi un dénommé Jules César.

Les origines légendaires de Rome : Romulus et Rémus

De la naissance des jumeaux à Albe…

Romulus et Rémus sont nés de l’union de Mars, dieu de la Guerre, avec une vestale, Rhéa Silvia.

Or, Rhéa Silvia n’est pas n’importe qui. Elle est la nièce du roi d’Albe, Amilius. Celui-ci a détrôné son frère, Numitor, le père de Rhéa Silvia.

Rhéa Silvia prend peur lorsqu’elle apprend qu’elle est enceinte. Elle sait qu’Amilius va ordonner la mort de ses enfants, car il craint d’être détrôné. Elle abandonne donc ses fils au fleuve du Tibre (selon d’autres versions, c’est Amilius qui les jette à l’eau).

Les eaux amènent les enfants jusqu’au pied d’une colline, le Palatin. Là, une louve les recueille et les nourrit.

Une louve… ou une louve ? En latin, le terme lupa recouvre deux réalités : la louve et la prostituée. Il est donc possible que les jumeaux aient été retrouvés et soignés par une prostituée.

On parle aussi d’un berger, Faustulus, qui les découvre auprès de la louve et les élève ensuite jusqu’à ce qu’ils aient atteint l’âge adulte.

… à la naissance officielle de Rome

Bref ! Les jumeaux grandissent et finissent par se retrouver à la tête d’une bande de bergers-brigands redoutables. Ils retournent alors à Albe pour détrôner Amilius et remettre leur grand-père Numitor sur le trône.

Leur destinée est ailleurs, elle se trouve sur les lieux où ils ont échoué et ont été nourris par la louve (qui que soit celle-ci par ailleurs !). C’est le mont Palatin et le site de la future Rome, sur les bords du Tibre.

Le 21 avril 753 avant J.-C., d’après Tite-Live, Romulus creuse le sillon qui va matérialiser les limites sacrées de la nouvelle cité. Les dieux ont déterminé l’emplacement du sillon, leur volonté a été révélée par les augures (ici, l’observation du vol des oiseaux).

Une dispute éclate alors entre les jumeaux au sujet d’une question d’aînesse. Pour provoquer son frère, Rémus franchit le sillon. Furieux, Romulus le tue. Il sera ensuite le premier roi de Rome.

Aux origines de Rome, Romulus tue Rémus. Gravure de Matthäus Merian l'Ancien (XVIIe siècle) - Bibliothèque universitaire de Dresde
Aux origines de Rome, Romulus tue Rémus. Gravure de Matthäus Merian l'Ancien (XVIIe siècle) - Bibliothèque universitaire de Dresde

Ce que disent l’archéologie et l’histoire sur les débuts de Rome

Régulièrement, des trouvailles permettent de faire coïncider les textes, les légendes et l’histoire.

Rome vers l’an 1000 av. J.-C.

Vers l’an 1000 avant J.C., d’après l’archéologie, les rives du Tibre étaient bordées de quelques huttes de forme ovale. Il s’agissait de villages de bergers qui occupaient le Palatin et quelques collines avoisinantes. C’est l’un des plus vieux sites du Latium que l’on ait retrouvés. Ces huttes, les plus anciennes de Rome se trouvent déjà dans le périmètre sacré attribué à Romulus, ce qu’on appelait alors le pomerium.

Rome au VIIIe siècle av. J.-C.

En 1985, sur le site de Rome, le professeur Cardini, archéologue, a retrouvé un fossé datant du VIIIème siècle avant J.-C., c’est-à-dire de l’époque où auraient vécu les jumeaux. Les villages de bergers s’étaient alors développés pour devenir des communautés plus importantes et diversifiées. Aux origines de Rome, ils entretenaient des rapports pacifiques avec les Grecs et les Étrusques.

Rome au VIIe siècle : les rois latins

Vers 650-600, les vestiges retrouvés indiquent l’émergence d’une ville qui se construit sur les sept collines de Rome, en commençant par celle du Palatin où, selon la légende, le berceau des jumeaux a échoué. Rome s’est développé jusqu’à inclure la vallée du Tibre. Elle est remarquablement située, puisqu’elle contrôle le franchissement du fleuve. C’est un point de passage commode entre le nord et le sud du Latium. C’est également un verrou sur la route du sel qui se trouve à l’embouchure du Tibre.

Au cours du VIIème siècle, sous les règnes des rois Tullus Hostilius et Ancus Martius, Rome agrandit son territoire en s’emparant d’Alba Longa, Albe la Longue, la cité des rois Amilius et Numitor de la légende. Plus tard, elle conquiert Ficana et d’autres villages qui lui donnent accès à la mer.

Tullus Hostilius et Ancus Martius sont les troisième et quatrième rois après Romulus et Numa Pompilius. Ces rois étaient d’origine latine ou sabine. Cela et de nombreuses influences sabines discernables dans la langue latine permettent de supposer qu’il y avait beaucoup de Sabins dans la population de la Rome primitive.

À la fin du VIIème siècle, Rome est devenue une ville. Le centre marécageux est drainé. On y installe un marché central, le Forum, qui est aussi un centre politique. Ce Forum est pavé. des bâtiments publics apparaissent : l‘autel de Vesta, la déesse du Foyer, et le palais royal, par exemple. Les sept collines sont entourées d’une enceinte. On commence aussi à construire un grand temple à Jupiter Capitolin.

Dans certains quartiers, les cabanes en chaume sont remplacées par des maisons à charpente de bois avec des fondations en pierre et des toits de tuile.

Rome au VIe siècle : les rois étrusques

Les fouilles archéologiques attestent que le Palatin a été la première colline habitée par les Étrusques qui ont dominé Rome au VIe siècle. Le premier roi est Tarquinius Priscus (Tarquin l’Ancien, 616-579). Il appartenait à une famille étrusque aisée qui s’était installée à Rome. Il est élu roi par les Romains après la mort d’Ancus Martius.

On peut supposer que, à cette époque, à Rome et dans certaines villes étrusques, certains groupes ou individus pouvaient choisir librement leur communauté et s’y faire accepter.

Les Étrusques apportèrent à Rome leur civilisation, leur artisanat et leur art, qui influencèrent profondément la culture romaine. Toutefois, Tarquin et ses successeurs furent des rois indépendants, et non des espèces de représentants d’une puissance étrangère. Les Romains finirent par renverser le dernier d’entre eux non pas car il était étrusque, mais parce qu’il s’était comporté comme un tyran aux yeux des sénateurs.

En effet, Tarquin l’Ancien avait ouvert le Sénat, qui était l’assemblée gouvernante des anciens, à d’autres personnes que les chefs des familles riches. Son successeur, Servius Tullius, créa même d’autres assemblées populaires. Lui, puis Tarquin le Superbe (Tarquinius Superbus) régnèrent sans l’assentiment de l’assemblée romaine originelle, la comitia curiata

Ce mode de gouvernance fut insupportable pour les grandes familles aristocrates. Elles renversèrent et chassèrent Tarquin le Superbe en 509. Alors commença la république romaine, qui allait durer près de 500 ans.

Tarquin le Superbe inaugurant le temple de Jupiter Capitolin à Rome - Peinture de Pierin del Vaga (XVIème siècle)
Tarquin le Superbe inaugurant le temple de Jupiter Capitolin à Rome - Peinture de Pierin del Vaga (XVIème siècle)

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Crédits image en-tête : Louve Capitoline – Sculpture en bronze montrant l’allaitement des jumeaux Romulus et Rémus par la louve – Musée du Capitole – Photo de Matthias_Lemm

Sources : OLIPHANT, Margaret, Atlas du monde antique, Éditions Solar, 1992, Paris

À PROPOS DE L'AUTEURE

Je suis Marie, passionnée d'antiquité et de mythologie grecque depuis l'enfance. J'ai acquis un gros bagage dans ce domaine grâce à mes lectures, innombrables, sur le sujet : ma bibliothèque compte plusieurs centaines d'ouvrages, sources antiques et essais historiques traitant de nombreux aspects de ces périodes anciennes.

Je suis également diplômée d'histoire ancienne et médiévale (Maîtrise, Paris IV Sorbonne). J'ai notamment travaillé sur l'antiquité tardive, le Bas Empire romain et la romanisation des peuples germaniques.

Je suis l'auteure de plusieurs romans et nouvelles, dont Atalante, qui réinterprètent et revisitent la mythologie grecque et l'antiquité.

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