Mis à jour le 15 juin 2024
Qui sont les premiers philosophes grecs anciens ?
- Thalès de Milet
- Pythagore de Samos
- Anaximandre et Anaximène de Milet
- Xénophane de Colophon
- Parménide d’Élée
- Empédocle d’Agrigente
- Héraclite d’Éphèse
- Anaxagore de Clazomènes
- Démocrite d’Abdère
- Socrate
- Platon
- Antisthène
- Aristippe
- Aristote…
Ces penseurs des époques archaïque et classique sont les premiers à développer une pensée rationnelle et une réflexion scientifique. Parlent-ils déjà de morale ? Pas tous, mais ils sont bel et bien les premiers à interroger le monde pour essayer de le comprendre, au-delà de la cosmogonie proposée par la religion.
Découvrons-les !
Mathématiciens et astronomes : les premiers philosophes grecs anciens
Aujourd’hui, les collégiens les connaissent bien ! (Ou devraient les connaître. XD)
Thalès de Milet et Pythagore de Samos sont plutôt considérés comme des mathématiciens et des astronomes. Pourtant, leur dimension philosophique est essentielle : ils développent la pensée scientifique parce qu’ils s’interrogent sur le monde.
En Ionie, à partir du début du VIe siècle pour Thalès et dans la seconde moitié du VIe siècle pour Pythagore, ils inventent l’enquête scientifique et ce qui va devenir la philosophie.
Pythagore développe en outre une forme d’ascèse mystique qui va beaucoup influencer les époques à venir. Avec lui, on glisse même vers une forme de politique puisqu’il initie un mode de vie particulier à Crotone (Italie), où il a été exilé.
Métaphysique et ontologie : les Grecs qui interrogent le monde et l’être
La métaphysique étudie la réalité. L’ontologie est l’étude de l’être. Avec les successeurs de Thalès et de Pythagore, on voit émerger plus distinctement ses disciplines philosophiques. On possède des fragments de ces premiers penseurs grâce à leurs successeurs qui les ont cités dans leurs écrits.
Méditations sur la nature et sur l’être
Anaximandre et son disciple Anaximène méditent ainsi sur la nature et son essence véritable. Ce sont des contemporaines de Thalès et ils sont tous deux de Milet, comme lui : nul doute qu’ils se soient rencontrés.
France Info a dédié un podcast à Anaximandre dans sa dimension scientifique : il a été le premier à supposer que notre bonne vieille planète flottait dans l’espace !
Les philosophes grecs anciens Parménide d’Élée, le maître de Zénon, et Empédocle d’Agrigente emploient la forme poétique pour exposer leurs conceptions ontologiques.
Pendant ce temps, leur contemporain Héraclite d’Éphèse proclame que tout est conflit perpétuel, mouvement et devenir. Il écrit en prose.
Critiques de la religion grecque
À la fin du VIe siècle, Xénophane de Colophon développe en vers une théologie d’un dieu unique impersonnel. Il critique donc le polythéisme anthropomorphique !
Au Ve siècle, Anaxagore de Clazomènes reprend lui aussi plusieurs préjugés répandus liés aux cultes et à la religiosité grecque comme la divinité des astres et même certaines formes de divination. Il les critique de façon rationnelle et affirme que le principe essentiel du monde est un Esprit qui a ordonné le Chaos primitif. Même s’il est ami de Périclès, il n’échappe pas à la colère d’Athènes : il est accusé d’impiété et exilé.
Démocrite d’Abdère, qui est un peu plus jeune, entreprend d’expliquer différemment les dieux. Il invente pour cela une nouvelle notion : celle de l’atome. Ce nouveau concept lui permet d’expliquer toutes choses… y compris Zeus et les autres !
D’après la légende, Hippocrate de Cos est envoyé auprès de lui car les gens le disent fou. Démocrite rit en effet de tout. Hippocrate diagnostique seulement chez Démocrite une grande propension au bonheur et la capacité à voir et rire de la folie des hommes. 🙂
On peut d’ailleurs classer Hippocrate lui-même parmi les philosophes. Cet homme était issu d’une famille de médecins qui pratiquaient le culte d’Asclépios, mais il appliquait à son art les principes d’une observation rationnelle. Il a fondé la médecine clinique par ses travaux. Il a aussi fixé les devoirs des médecins dans le célèbre serment qui est toujours leur règle d’or.
Du scepticisme à la morale : des sophistes à Socrate
Dans le courant du Ve siècle, la pensée philosophique change peu à peu. Jusque là, les philosophes grecs anciens spéculaient beaucoup sur la cosmogonie. La réflexion rationnelle conduit désormais au scepticisme.
Les sophistes et la pensée rationnelle poussée à l’extrême
L’excès de rationalité et de scepticisme conduit même au sophisme, cet art de tromper l’auditoire et de semer le doute par des raisonnements fallacieux, voire contradictoires. Athènes accueille un temps avec enthousiasme l’enseignement des sophistes, car ce sont vraiment des génies de la parole. Ils gagnent leur vie grâce à leurs leçons d’éloquence et de dialectique. Mais point trop n’en faut : ils auront droit eux aussi à leur procès pour impiété.
Les dialogues de Platon montrent la virtuosité de Gorgias de Léontini ou de Protagoras d’Abdère.
Puis, vers 430, commence l’enseignement de Socrate. On ajoute une autre dimension à la philosophie : la morale.
Socrate et la morale
Socrate n’est pas un sophiste, mais il est rompu aux habiletés verbales de ces derniers. Il est tellement influent par sa parole et son exemple que tous les philosophes qui lui sont antérieurs deviennent des « présocratiques ».
Protagoras avait dit :
« L’homme est la mesure de toutes choses. ».
Socrate va effectivement mettre l’étude de l’âme humaine au centre de ses préoccupations.
Il propose à chacun de commencer par un essentiel : essayer de se connaître soi-même. Le « Connais-toi toi-même » est l’une des trois maximes gravées à l’entrée du temple d’Apollon à Delphes.
La pensée de Socrate s’articule donc autour de l’observation psychologique et de la réflexion morale. Il prend d’humbles exemples dans la vie quotidienne des gens qui l’entourent. Puis, lentement mais sûrement, il amène ses interlocuteurs aux concepts de vertu et de vérité.
« Socrate le premier fit descendre du ciel la philosophie, l’installa dans nos villes, l’introduisit même dans nos maisons et l’obligea à s’occuper de la morale pratique, du problème du bien et du mal. » (Cicéron, Tusculanes, V, 10)
Socrate n’a rien écrit. Mais c’est lui qui, par sa pensée, va mettre en mouvement le philosophe le plus connu de notre Histoire : son disciple Platon.
Platon : le philosophe par excellence
Platon enseigne à partir de 387. Ses cours ont lieu dans le gymnase consacré au héros Académos, au nord-ouest de la porte du Diptylon, près d’Athènes. De là vient le nom d’Académie que prend cette école.
La place de Platon parmi les philosophes grecs anciens
Je ne suis pas là pour juger du génie des uns et des autres. 😀 Je peux juste remarquer que Platon a été considéré comme le philosophe le plus essentiel à la pensée du monde par ses contemporains et ses successeurs.
Ce qui me fait dire cela ? C’est qu’on a absolument tout gardé de ce qu’il a écrit. Et il a beaucoup écrit. Quand on sait le nombre de textes antiques qui ont été perdus au fil des siècles, c’est très révélateur !
Tout comme les antiques révéraient les poèmes d’Homère, ils plaçaient les ouvrages de Platon très au-dessus de ceux des autres philosophes grecs.
L’évolution intellectuelle de Platon
Les dialogues de Platon ont été classés chronologiquement par les modernes. Ces derniers se sont basés sur le style des œuvres pour faire ce classement. Quelques apocryphes s’y sont glissés. On ne peut être sûr de rien mais, globalement, ça doit correspondre à la réalité.
Cette classification nous permet de suivre l’itinéraire intellectuel de Platon, du Lachès jusqu’aux Lois.
- Les premiers dialogues sont fidèles à la méthode de Socrate. C’est grâce à eux que nous connaissons l’enseignement du maître.
- Ensuite, Platon affirme sa personnalité et expose ses propres thèses. Toutefois, il garde la figure de Socrate : c’est toujours lui qui est le principal interlocuteur.
Les sujets d’intérêt de Platon
Quelles sont les préoccupations de Platon ?
Elles sont d’abord morales, comme celles de Socrate. Il s’agit de définir le courage, la piété, la vertu ou la justice à partir d’une enquête sur le langage et le comportement des gens.
Puis Platon va élargir ses recherches à des sujets plus vastes, en quelque sorte :
- Comprendre l’univers grâce à la théorie des Idées. En cela, Platon rejoint les spéculations ontologiques des philosophes présocratiques.
- Saisir la nature de l’âme immortelle et ses relations avec le corps.
- Formuler des lois pour une cité idéale. Pour Platon, la métaphysique et la psychologie aboutissent fatalement à la politique. La politique doit transformer la pensée en action.
Platon trouve la matière à ses réflexions dans de nombreuses sources : ses lectures, ses voyages, ses rencontres avec toutes sortes de gens (hommes publics, savants, écrivains, les autres philosophes grecs anciens…). Cela lui permet d’évoquer des problèmes variés.
Le style de Platon
Platon met en scène des personnages qui sont différents les uns des autres. Grâce à ces personnages, il peut exposer toutes les thèses qui s’affrontent dans chaque controverse.
En effet, les écrits de Platon sont des dialogues. Chacun peut s’exprimer et exposer son avis. À la fin, toutefois, Platon conclut toujours.
Le style de Platon a marqué son auditoire. Platon utilise différentes tonalités : l’ironie, l’abstraction, la poésie parfois, quand il évoque un paysage ou un mythe. Il peut aussi faire rire en pastichant un sophiste ou un simple orateur.
Tout ceci, le fond et la forme, explique certainement le rayonnement de ses ouvrages et de son enseignement.
En dehors de Platon : cynisme, épicurisme et aristotélisme
On ne peut pas laisser Platon prendre toute la place. Parmi les disciples de Socrate, il y a eu d’autres penseurs. Certains d’entre eux sont peu connus et, pourtant, ils vont être à l’origine de courants philosophiques très puissants dans les siècles à venir.
- L’Athénien Antisthène a écrit de nombreux dialogues et des traités que malheureusement nous avons perdus. Il a fondé l’école Cynique. Le nom est tiré du gymnase du Cynosarges, un quartier d’Athènes où il enseignait.
- Le Cyrénéen Aristippe, théoricien du plaisir, a été oublié… mais pas le courant qu’il a initié : l’épicurisme !
Pour ce qui est des disciples de Platon, en revanche, ils ont quasiment tous été éclipsés par une figure incontournable de l’époque hellénistique : Aristote. Mais ceci est une autre histoire !
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Sources : CHAMOUX, François, La Civilisation grecque, Arthaud, Paris, 1984
Crédits image d’en-tête : Détail de la peinture de Raphaël, l’École d’Athènes (1508-1512) – Musée du Vatican – Wikimedia Commons
À PROPOS DE L'AUTEURE
Je suis Marie, passionnée d'antiquité et de mythologie grecque depuis l'enfance. J'ai acquis un gros bagage dans ce domaine grâce à mes lectures, innombrables, sur le sujet : ma bibliothèque compte plusieurs centaines d'ouvrages, sources antiques et essais historiques traitant de nombreux aspects de ces périodes anciennes.
Je suis également diplômée d'histoire ancienne et médiévale (Maîtrise, Paris IV Sorbonne). J'ai notamment travaillé sur l'antiquité tardive, le Bas Empire romain et la romanisation des peuples germaniques.
Je suis l'auteure de plusieurs romans et nouvelles, dont Atalante, qui réinterprètent et revisitent la mythologie grecque et l'antiquité.