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Dominique Lémuri : autrice de SF et mère du Vood

Marie – Bonjour Dominique ! Merci d’avoir accepté de passer à la moulinette de mes questions sur mon blog. 🙂 Je suis très heureuse d’accueillir une autre autrice de SF (la dernière fois, c’était Charlotte Bona pour son excellent Havensele !). Comme tu t’en doutes, on va donc parler science-fiction !

Tu es l’autrice de Sous la Lumière d’Hélios, un super roman de science-fiction dont on va abondamment parler dans l’interview. Pourquoi ce genre-là et y a-t-il d’autres genres dans lesquels tu aimes tremper ta plume ?

Une autrice nourrie aux classiques de la SF

Dominique — Déjà, merci pour ton invitation, je suis très honorée !


Alors, pourquoi la SF ? C’est le genre de romans d’aventure que j’ai le plus dévoré durant mon adolescence, c’est sûrement un clin d’œil à la jeune fille que j’étais alors et qui se rêvait écrivain. J’ai commencé à écrire des nouvelles au collège, plutôt du fantastique horrifique. J’ai relativement peu lu de fantasy et je n’en ai pas écrit. Ce n’est pas le genre qui m’attire spontanément, même si j’apprécie le travail de nombre d’auteurs, en particulier francophones.


En ce moment, je corrige mon deuxième roman (c’est presque un troisième, puisque Sous la lumière d’Hélios était à l’époque prévu comme un dyptique) qui est une aventure fantastique mettant en scène une étudiante fan de rock et sorcière qui s’ignore, qui va devoir se dépêcher de prendre conscience puis de maîtriser ses pouvoirs… avant une catastrophe, bien sûr ! Problème : c’est une scientifique parfaitement rationnelle.
Et ensuite, j’ai d’autres histoires dans ma liste à écrire, dont d’ici quelques années un roman de fantasy, comme quoi tout arrive !

Dominique Lémuri
Photo publiée avec l'aimable autorisation de Dominique Lémuri

Marie — Ta réponse me fait découvrir la petite fille qui rêvait un jour d’être écrivain. Comme j’avais le même rêve aussi, j’ai très envie de te demander d’en dire plus là-dessus. 🙂 1. L’écriture, c’était quoi pour toi, déjà toute petite ?  2. Est-ce que ce rêve d’être écrivain t’a suivie depuis, sans jamais te lâcher ?  3. Qu’est-ce qu’il représentait à tes yeux ? 4. Et, pour le fun, j’ai envie de te demander ce que tu penses du terme « écrivaine » (parce que le mot « autrice » est déjà bien entrée dans le vocabulaire, mais je vois moins souvent celui-ci et, pour ma part, je le trouve très beau !).

[NDLR : Comme j’ai bombardé Dominique de questions d’un coup,  ses réponses suivantes sont numérotées. :-D]

Dominique — (Question 1). Petite fille j’aimais les livres, j’ai toujours eu un livre sur ma table de chevet depuis le moment où j’ai su lire. Mes parents m’encourageaient à lire et mes grands frères aussi, mais l’envie d’écrire est arrivée à la fin du collège, avec mon journal, puis mes premières nouvelles fantastiques. J’écrivais peu avant, ou seulement pour l’école (mais toujours des trucs très imaginatifs, comme l’histoire du lapin scientifique ^^. L’exercice de la rédaction, écriture sous contrainte s’il en est, était mon préféré) Je passais plus de temps à dessiner et à construire en légo qu’à écrire pour moi avant le collège. Et j’aimais beaucoup les feuilletons à la télé (Cosmos 1999, le Prisonnier, etc) !

(Question 2). Oui, dès que j’ai commencé à écrire et à recueillir des encouragements des amies (ou professeurs) à qui je faisais lire ma prose, ça ne m’a plus lâchée, même si je n’ai pas écrit pendant une longue période de ma vie. Entre le boulot et les enfants encore petits, pas facile de s’enfermer seule avec mes histoires. Un peu avant ma cinquantaine, je me suis rendu compte que si je ne me mettais pas sérieusement à écrire, avec l’ambition d’être publiée, j’allais » mourir à l’intérieur ».

C’est ainsi que je l’ai présenté à mon entourage. Mes enfants avaient grandi, mon mari m’a immédiatement soutenue, comme toujours. Ils m’ont dit « Go !, On est avec toi ». J’avais besoin de cet accord parce que cela signifiait que je tirais un trait sur les soirées télé et sur une partie de mes week-ends, que j’allais avoir besoin de plages de tranquillité pour travailler mes textes. Cela n’a pas allégé mon emploi du temps mais j’ai fait un choix important pour ma créativité, ce jour-là : lui accorder la place dont elle avait besoin et qu’elle estimait mériter^^. Et j’adore écrire le soir.

(Question 3). Une liberté que je n’avais pas dans mon travail qui payait les factures. J’ai exercé toute ma vie un boulot totalement dénué d’invention dans un couple métier/entreprise où l’innovation n’existait pas. Écrire a été une extraordinaire porte de sortie et de survie pour mon imagination. Je crois que cela m’a évité un burn-out, et je me suis prouvé à moi-même que j’étais capable de réussir quelque chose seule (plus ou moins : j’ai besoin de bêta-lectures pour travailler, on y reviendra ! ), par ma volonté et ma détermination.

(Question 4). Je l’utilise moins qu’autrice, mais c’est vraiment une question de goût et d’habitude. J’ai adopté autrice très vite, dès que des articles expliquant l’histoire de ce mot sont parus, expliquant étymologiquement il était correct de l’utiliser.

série le prisonnier avec patrick mac gohan
série cosmos 1999

Un roman de science-fiction qui puise aux sources

Marie — Waouh, bravo Dominique de ne pas avoir laissé mourir cela en toi. L’écriture, ça a quelque chose d’un sacerdoce, mais nécessaire pour être vraiment soi et c’est super que tu te le sois accordé (et c’est tellement important quand la famille te soutient ^ ^⁾.
Bon, et si on parlait un peu de Clara, l’héroïne de Sous la Lumière d’Hélios ? De fait, c’est elle que tu as choisie pour te lancer dans cette aventure, c’est cet univers et ce genre (la SF) ? Pourquoi elle et quelle est son histoire ?

Dominique — C’est un peu compliqué de répondre parce que ce roman est un mix entre les histoires que j’inventais avec mes copines quand j’étais ado, les univers cinématographiques qui m’ont plu à cette époque (la trilogie d’origine Star Wars, Star Trek, Battlestar Galactica, etc.), les romans que j’ai aimés (comme Dune, qui est en haut de la pile des livres que j’emmènerais sur une ile déserte) auquel j’ai ajouté des éléments en cours d’écriture (typiquement, le Vood est arrivé bien après. Si si ! ). Donc, la SF s’est imposée, comme un genre où l’aventure était présente, l’exploration de mondes inconnus, etc. Il ne m’est jamais venu à l’idée d’écrire une dystopie, parce que j’avais envie d’un roman léger, simple, facile à lire et qui permette de s’évader. Bon, il fait 450 pages et des poussières, j’ai eu du mal à faire simple et léger :), je dois le reconnaître.


Clara, c’est mon archétype d’aventurière, celle que j’ai cherchée souvent dans les romans que je lisais dans mes jeunes années, en vain. Je voulais une femme qui fasse avancer l’histoire, active, indépendante, courageuse, et non dépendante des hommes pour avancer dans sa vie. Quelqu’un qui, malgré son jeune âge, soit capable d’évaluer les enjeux autour d’elle, y compris d’un point de vue politique. A qui on va faire confiance en lui donnant un rôle d’ambassadrice. J’aime l’idée qu’on donne de vrais postes de pouvoir aux jeunes, qui les aideront à s’affirmer et à apprendre à toute allure.

sous la lumière d'hélios, roman de science-fiction de dominique lémuri
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Le Vood, la créature SF qui fait polémique dans le roman

Marie — J’ai souvent ressenti la même chose que toi concernant les personnages féminins ! On a tellement besoin, nous les femmes ( 😀 ), d’héroïnes qui nous ressemblent davantage, loin des clichés situés aux extrêmes des personnages « badass » ou « nunuches ».


Tu parles du Vood, et c’est parfait, car je voulais te poser des questions là-dessus. C’est presque mon « personnage » préféré. Il m’a inspiré des tas de réflexion sur les futurs possibles de l’être humain et sur notre rapport à la nature et à la technologie : les Augmentés de ton roman de science-fiction craignent la symbiose permise par le Vood, qu’ils perçoivent comme une forme d’aliénation (je l’ai du moins ressenti ainsi), mais ils ne considèrent pas leur dépendance à la technologie comme une autre forme d’aliénation…


Est-ce que tu peux nous parler un peu du Vood, d’où t’est venue l’idée de ce concept, ce qu’il représente pour toi ?

Dominique — Alors, le Vood… j’avais envie de rencontres extra-terrestres, bien entendu. Je trouvais dommage d’avoir une planète habitable (à peu près), dotée d’une flore, mais pas d’une faune, et tant qu’à faire, une faune intelligente. J’aurais pu inventer autre chose, mais pour ce roman-là, je voulais retrouver l’esprit du cinéma d’aventure et de SF et de mes lectures d’ado. En revanche, je ne voulais pas refaire ce qui avait déjà été fait : pas d’êtres antropomorphes,, genre Petits Gris, pas de grandes pieuvres comme dans Premier Contact ou La Guerre des Mondes, je voulais que la nature intelligente de mon alien ne soit pas perceptible pour un esprit humain. On voit dans ma novella préquelle du roman Dans le coeur d’Eltanis que la contamination par le Vood est en fait un banal accident de laboratoire, c’est ce qu’on trouve dans plein d’oeuvres de SF (tiens, en ce moment je suis en train de regarder Raised by Wolves, et on retrouve ce genre de thème, du scientifique trop curieux qui, à un moment donné, oublie toute règle de protection individuelle et … paf).


L’idée du Vood m’est venue d’un de mes films de SF préférés, Abyss, de James Cameron, où les créatures extra-terrestres peuvent adopter la forme physique qu’elles souhaitent pour communiquer. Elles sont bienveillantes. La scène où le Vood adopte le visage de Yul ou prend la forme de la Terre pour communiquer avec Clara est directement inspirée de la scène dans Abyss où la créature échange avec le personnage joué par Marie-Elizabeth Mastrantonio, une scène émouvante et magnifique. Regardez Abyss.


Je croyais qu’il n’y avait que ça dans mon idée.


Puis, mon fils m’a dit qu’il avait entendu parler des X-files, la série de SF qui a marqué les spectateurs durant plusieurs décennies, dont moi. Nous avons ressorti les DVD et là… l’huile noire. C’est une entité extraterrestre, malveillante par contre, capable d’envahir un être humain, de le contrôler… je l’avais, je le jure, complètement oubliée quand j’ai conçu le Vood, mais mon cerveau, lui, l’a ressorti au bon moment pour ajouter cette dimension contamination/risque/inconnu…! L’écriture a quelque chose de magique, je trouve !


En conclusion, pour le Vood, je n’ai fait, comme c’est souvent le cas en littérature, que mixer des concepts déjà inventés par d’autres, à ma sauce.

scène du film abyss
La fameuse scène d'Abyss dans laquelle a lieu la rencontre entre humains et extraterrestre.

Marie — J’avais adoré le film Abyss lorsque je l’ai vu. 🙂

Et je plussoie, l’écriture, c’est magique ! Je me reconnais dans ton processus créatif !
Je laisse maintenant aux lecteurs et lectrices le plaisir de découvrir Clara, le Vood (et tous les autres personnages de ce super roman de science-fiction<3). Si on finissait en parlant de ton actualité et tes projets, dont ta sorcière rock’n roll ?

Dominique — Alors, côté actu : j’ai deux nouvelles de SF en cours de parution :

  • Une dont j’ignore quand elle sortira mais les corrections éditoriales sont faites. Aléa de la parution, mon amour.
  • L’autre pour le recueil de nouvelles Etrange K Dick, qui sort aux éditions Livr’S pour la première édition du festival Etrange-Grande. Ce sera les 17 et 18 septembre 2022, à Hettange-Grande, près de Thionville. Je suis invitée à ce salon, j’ai hâte d’y participer car il est porté par une équipe dynamique qui fait un boulot fantastique de promotion et d’organisation. Ils visent haut dès le début, je leur tire mon chapeau.

Je travaille sur la réécriture/correction d’un nouveau roman, que je destine plutôt à un public jeune adulte (exercice difficile pour moi qui n’ai écrit pour le moment que pour un public adulte). Le pitch : une étudiante fan de rock découvre que la batteuse de son groupe préféré possède d’inquiétants pouvoirs. Mais quand on étudie les sciences, on ne peut pas croire en la sorcellerie. Et encore moins devenir sorcière soi-même… N’est-ce pas ?


J’espère terminer cette phase de travail cet été si tout va bien. Je n’anticipe pas de le finir et qu’il soit près à être présenté à un éditeur avant 2023. J’ai besoin de temps pour écrire. La maturation est longue et je n’ai jamais regretté de prendre mon temps.


Et ensuite, j’ai un gros projet sur la danse, que j’ai mis en attente pour le moment et qui est prêt pour le premier jet. Ce sera un gros bébé, à peu près comme Hélios.


Pour la rentrée, j’ai monté un projet d’atelier d’écriture en lycée professionnel avec une amie professeure de français. J’attends que les derniers détails administratifs soient réglés pour me réjouir, mais j’espère très fort que nous pourrons le faire. J’en dirai plus quand ce sera officiel.

Marie —Je suis impatiente d’en savoir plus ! Merci beaucoup Dominique !

Dominique — Merci à toi, Marie, pour m’avoir accueilli dans ton espace et pour tes questions stimulantes !

Pour en savoir plus sur le roman de science-fiction Sous la Lumière d’Hélios (finaliste du prix Bob Morane 2021, au fait !) et sur Dominique, visitez son site et suivez-la sur ses réseaux Facebook et Instagram ! Et n’hésitez pas à vous adresser directement à l’autrice via son formulaire de contact pour l’acheter ! 😉

À PROPOS DE L'AUTEURE

Je suis Marie, passionnée d'antiquité et de mythologie grecque depuis l'enfance. J'ai acquis un gros bagage dans ce domaine grâce à mes lectures, innombrables, sur le sujet : ma bibliothèque compte plusieurs centaines d'ouvrages, sources antiques et essais historiques traitant de nombreux aspects de ces périodes anciennes.

Je suis également diplômée d'histoire ancienne et médiévale (Maîtrise, Paris IV Sorbonne). J'ai notamment travaillé sur l'antiquité tardive, le Bas Empire romain et la romanisation des peuples germaniques.

Je suis l'auteure de plusieurs romans et nouvelles, dont Atalante, qui réinterprètent et revisitent la mythologie grecque et l'antiquité.

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